Les médias français fournissent peu d’information, et si l’on en croit le quotidien le Monde relayant largement les informations fournies par l’AFP « des violences intercommunautaires font au moins trois morts à Djibouti. » Cet article daté mis en ligne le 3 août, et illustré par une photo montrant largement une affiche du président Ismaïl Omar Guelleh, fait la part belle à la parole gouvernementale. S’expriment en effet la procureure de Djibouti, Lamisse Mohamed Saïd qui s’est déjà illustrée en demandant avec beaucoup de zèle l’extradition de Mohamed Kadamy, réfugié politique en France depuis 2006, et le ministre de l’intérieur Said Nouh Hassan.
Certes être journaliste à Djibouti est quasiment impossible. Djibouti est classé 176ème au classement mondial de la liberté de la presse 2021 ne devançant que la Chine, le Turkménistan, la Corée du Nord et l’Erythrée. Et Reporters Sans Frontières indique à propos de Djibouti « L’arsenal répressif déployé contre les journalistes à Djibouti fait régner une véritable terreur médiatique. Aucun média privé ou indépendant n’est installé sur le territoire. Les seuls « médias » existants sont utilisés à des fins de propagande par le gouvernement d’Ismaïl Omar Guelleh. » L’on peut s’interroger dans ces conditions sur l’objectivité réelle du représentant de l’AFP.
Mais, même si les communications par téléphone ou par internet avec Djibouti sont devenues très difficiles, de nombreuses publications sont disponibles sur les réseaux sociaux. Elles montrent et dénoncent l’action des forces gouvernementales aux côtés des pseudo-émeutiers dirigeant la violence contre des représentants de la communauté afar. Et de plus des représentants de l’opposition djiboutienne auraient dû être joints pour avoir une autre vision des évènements en cours. Il s’agirait d’une tuerie organisée par l’Etat, exécutée par la Police, le 1er et 2 août, le bilan est lourd selon la Ligue Djiboutienne des Droits Humains : 9 morts par balles, une vingtaine de disparus et 120 blessés dont 15 dans un état grave. Deux cent cinquante logements ont été incendiés par des policiers en civil à Walabaler, au PK 12 et à Balbala. De nombreuses familles depuis sont sans abris et privés de tout, dorment sans toit, sous la pluie et sans aucune assistance.
Selon l’avocat Mohamed Abayazid, « la police a failli à sa mission de maintien de l’ordre public et a pris parti dans cette tragédie. »
Faut-il rappeler qu’en 1994 la presse a fait preuve d’un aveuglement persistant en s’obstinant à évoquer des affrontements interethniques au Rwanda, reprenant ainsi la position officielle du gouvernement français.
Faudra-t-il attendre des commissions d’enquête 20 ans après pour savoir ce que si passe à Djibouti ? La situation est grave, des hommes, des femmes, des enfants sont assassinés.
Nous attendons une information objective des médias et une prise de position immédiate du gouvernement français.
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