« La loi a fait de moi un criminel, non à cause de ce que j’ai fait, mais en raison de ce qui me poussait à me lever, de ce que je pensais, de ma conscience. »
Nelson Mandela

UEFA étrangement silencieuse.

 » Il y a malheureusement des événements tragiques qui se déroulent presque quotidiennement partout dans le monde, et il serait tout simplement irréaliste de rendre hommage à toutes les victimes. Nous condamnons fermement toute sorte de violence, y compris les attaques d’Orlando, et nous exprimons notre profonde sympathie aux victimes de cette horrible tragédie et à leurs familles  » a déclaré l’UEFA : il n’y aura donc pas de minute de silence lors des trois matchs de ce jour.

Si l’on peut entendre l’argument concernant la multiplicité des événements tragiques, l’on ne peut que regretter cette déclaration qui, si elle cite la ville où a eu lieu la fusillade, ne prend même pas la peine de préciser qu’il s’agit là d’une attaque homophobe perpétrée dans une discothèque gay ; alors que la Marie de Paris arbore l’arc-en-ciel du drapeau LGBT et Anne Hidalgo a adressé « un soutien fort à tous les gays, lesbiennes bi et trans meurtris par une attaque qui vise à remettre en cause la première de leurs conquêtes : le droit de vivre en paix ».

Dans un sport régulièrement épinglé pour ses dérives homophobes, une telle mesure aurait eu un poids symbolique important. Faut-il rappeler à l’UEFA les nombreuses initiatives prises dans de très nombreux sports, y compris aux États-Unis, au lendemain des attentats perpétrés en France en janvier et novembre 2015. Certains morts seraient-ils pour les instances dirigeantes de l’UEFA moins dignes de respect que d’autres ?

Droit de manifester vs état d’urgence

L’information circule depuis hier, plusieurs personnes ont reçu une interdiction administrative de manifester.

Ce document indique « considérant que, en raison de la prégnance de la menace terroriste dont l’extrême gravité et l’importance des risques ont conduit le parlement à prolonger pour une seconde fois le régime de l’état d’urgence pour une dure de trois moins à compter du 26 février 2016, les forces de l’ordre demeurent fortement mobilisées pour assurer, dans ces circonstances, la sécurité des personnes et des biens.

Considérant que M. X a été remarqué, à de nombreuses reprises, lors de manifestations contre, notamment, les violences policières et le projet de réforme du Code du travail ; que ces manifestations ont dégénéré en troubles graves à l’ordre public et notamment des affrontements violents avec les forces de l’ordre ; que des groupes d’individus masqués et portant des casques sont systématiquement à l’origine de ces désordres ; qu’il y a, dès lors, tout lieu de penser que la présence de M. X aux rassemblements organisés contre le projet de loi visant à instituer de nouvelles libertés et de nouvelles protections pour les entreprises et les actifs vise à participer à des actions violentes ; que, compte tenu de ces éléments, il y a lieu d’interdire sa présence à la manifestation organisée le mardi 17 mai 2016 conjointement par l’Union Régionale Île-de-France CGT, FO, SOLIDAIRES, l’UNEF, l’UNL et la FIDL ainsi que place de la République. »

L’on ne peut que s’étonner de l’utilisation de l’état d’urgence -qui aurait dû être un état d’exception mais qui semble, tout comme le plan Vigipirate avant lui, devenir l’état normal- pour réprimer un mouvement social et limiter le droit de manifester alors que, comme le document préfectoral le précise, l’objet de l’état d’urgence est de lutter contre la menace terroriste. Le lien entre les deux éléments est pour le moins difficile à établir, sauf, apparemment, pour le Préfet de Police. De plus, l’appréciation de ce même Préfet sur la loi travail assez inattendue et semble en décalage par rapport au devoir de réserve d’un fonctionnaire, aussi haut placé soit-il.

L’état d’urgence avait déjà été utilisé contre la COP 21, il serait temps que le gouvernement cesse de détourner tous les moyens juridiques pour tenter de faire passer en force un texte dont il est clair que personne, sauf le Medef, ne veut.

La démocratie n’est pas négociable, le Comité de l’ONU contre la torture vient de le rappeler en faisant part de sa préoccupation face aux violences policières en France. « Le Comité est préoccupé par les allégations d’usage excessif de la force par les fonctionnaires de polices et de gendarmerie ayant, dans certains cas, entraîné des blessures graves ou des décès. »

Du bon usage des prénoms

La nouvelle s’est vite répandue : Robert Ménard a déclaré sur le sur le plateau de Mots Croisés, sur France 2, détenir des statistiques religieuses sur les enfants fréquentant les écoles publiques de la ville de Béziers. Pour faire bonne mesure Robert Ménard a ajouté « Les prénoms disent les confessions. Dire l’inverse, c’est nier une évidence… » Cela traduit une étrange et angoissante vision du monde. Les parents ne choisiraient donc les prénoms qu’en fonction de leur religion : les parents des Erwan, Gaël et autres prénoms celtes seraient donc sans aucun doute des adeptes du druidisme ayant échappé pendant des siècles aux foudres de l’inquisition. Les filiations interreligieuses se reconnaîtraient sans aucun doute à un double prénom. Quant aux parents athées il ne reste qu’à présumer qu’ils choisissent les prénoms de leurs enfants dans le calendrier révolutionnaire. Et bien sûr, dans le respect du sacro-saint triptyque Travail-Famille-Partie, les enfants conservent tous la religion de leurs parents, comme Jésus de Nazareth.

Quant à Robert Ménard, son prénom évoque pour moi non pas l’Église sainte catholique et apostolique mais un grand monsieur, Paul Robert, grand amoureux de la langue française dont, faut-il le rappeler, plus de la moitié des locuteurs n’est pas de nationalité française, la francophonie rayonnant largement au-delà de nos frontières que d’aucuns voudraient étanches. Ce joli mot de francophonie ayant été employé pour la première fois par un anarchiste, le géographe Elysée Reclus.

Robert Menard, après avoir été Reporters Sans Frontières, devenu maire sans limites, dussent-elles légales ; de la ville de Béziers a déclaré « Je sais que je n’ai pas le droit mais on le fait… ». Cette absence de scrupules ajoutée à l’aveu d’une infraction pourrait prêter à sourire si ce n’était là la mise en œuvre d’une politique ségrégationniste.

Le procureur de Béziers a annoncé ce mardi l’ouverture d’une enquête préliminaire.

 

Libre arbitre ?

Madame Fleur Pellerin, ministre de la Culture et de la Communication, a prononcé un discours le 19 décembre 2014 devant le Conseil National des Professions du Spectacle. Elle a notamment déclaré, et l’on ne peut que s’en féliciter « Je me battrai aux côtés des artistes, des créateurs et des professionnels de la culture pour affirmer la place de la culture au cœur de notre ambition politique. Notre modèle s’est bâti sur le soutien aux artistes et sur les principes de démocratisation culturelle pour que cette création soit accessible au plus grand nombre. Cette politique s’est construite sur une volonté de l’Etat, partagée et amplifiée par les collectivités elle a permis de mailler notre territoire d’établissements de création et de diffusion mais aussi de dispositifs de soutien aux compagnies et aux artistes, d’aides et de financements. C’est un investissement, un héritage, fruit de longues années d’un travail patient. J’ai dit que je le laisserai pas démanteler.… »

Arrivé à cet instant de l’intervention, une seule question se pose, qui donc veut la peau, non pas de Roger Rabbit, mais de ce modèle culturel.

La réponse ne se fait pas attendre, Madame Fleur Pellerin indique  » Alors que l’Etat a fait le choix de la culture, certaines collectivités territoriales se désengagent. Je soutiendrai avec force les nombreuses collectivités qui font le choix courageux de la culture » après avoir pris soin de préciser  « les choix budgétaires sont des choix politiques qui doivent être assumés comme tels.’

Sur ce dernier point, je ne peux qu’être en accord, les choix budgétaires sont la traduction concrète des choix politiques que nous mettons en œuvre, mais une nuance doit être apportée, si nous devons assumer nos choix budgétaires il ne nous appartient pas d’assumer ceux des autres, et notamment ceux de l’Etat.

 

Il existe deux notions scolastiques de la liberté, la liberté de spontanéité, un acte est libre si en accord avec les valeurs de son agent,  qui souligne la volonté, et la liberté d’indifférence, un acte est  libre s’il aurait pu être accompli d’une autre manière,  qui souligne l’aptitude. En, l’occurrence, je crains que pour beaucoup de collectivités locales la possibilité d’agir d’une autre manière est fortement contrainte par la décision du gouvernement dont fait partie Madame Fleur Pellerin de réduire de onze milliards les dotations aux collectivité locales.

Alors, Madame la Ministre, si vous voulez pointez du doigt les collectivités dont le désengagement est le résultat d’un choix politique, commencez donc par vous battre pour rendre à ces collectivités les moyens d’agir et de choisir librement leurs politiques. Vous n’êtes pas légitime à stigmatiser l’une ou l’autre des collectivités locales quand toutes vont être amenées à prendre des décisions insupportables, le seul choix qui leur reste étant de savoir quels budgets feront l’objet de coupes claires.

Et enfin, puisque vous indiquez, Madame la Ministre, dans votre discours que « Les collectivités locales, comme l’Etat, doivent faire un important effort budgétaire » n’oubliez-pas que c’est l’Etat, et non, les collectivités locales qui est responsable de l’évolution de la dette publique. En effet, du 4ème trimestre 1995 ( trimestre de référence) au 3ème trimestre 2014 la dette de Maastricht a augmenté pour l’Etat de 231,76% et pour les collectivités locales de 60,14%.

Inacceptable !

J’ai découvert, avec étonnement, la chronique de Pierre-Louis Basse « surveiller et punir… » publiée dans l‘Humanité ce 24 avril.

Le titre l’annonce, Pierre-Louis Basse fait appel à Michel Foucault, Gilles Deleuze, puis à La Boétie pour sa servitude volontaire.  » La grande surveillance à tant de beaux jours devant elle » déclare-t-il. Mais que est l’objet de cette violente charge ? Vu les moyens employés l’on ne peut que penser à un danger majeur pour les libertés publiques, à côté duquel les écoutes de la NSA ne seraient que roupie de sansonnet.

En réalité, l’objet de l’ire de Pierre-Louis Basse est le mouvement Stop au harcèlement de rue à cause duquel il faudrait « rayer de la carte du Tendre toutes les plus belles dragues du cinéma mondial. » N’en déplaise à ce monsieur, pour moi, Tendre et harceleur seront à tout jamais incompatibles. Et a-t-il au moins lu, avant d’écrire cette diatribe, les déclarations de ce collectif dont une des membres expliquait dans une interview sur le site journal des femmes[1] « Nous tentons simplement de pointer du doigt la différence entre séduction et harcèlement «  Cette distinction me semblait pourtant aisément accessible à un lecteur de Michel Foucault,  et Gilles Deleuze. Enfin, je ne peux que déplorer de  trouver un tel texte dans un journal qui se veut progressiste. L’Humanité a encore bien du chemin à faire.

 

[1] http://www.journaldesfemmes.com/societe/combats-de-femmes/stephanie-stop-harcelement-de-rue-stop-harcelement-de-rue-interview.shtml

 

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